- Bonjour Elise, bonjour Noémi ! Merci de prendre un peu de temps pour nous répondre. Ensemble, vous gérez les réseaux sociaux de Lausanne à Table : concrètement, qui s’occupe de quoi ?
Elise : je suis secrétaire générale de Lausanne à Table, préalablement Lausanne Ville du Goût depuis sa naissance en 2012. J’ai engagé Noémi pour l'édition 2014, d'abord comme "food reporter" grâce à son blog funambuline et rapidement comme consultante principale en communication, puis comme membre du Comité de l'association. Chaque année, nous élaborons une stratégie globale de contenu avec l'aide de notre webmaster, de notre graphiste et de notre photographe, puis nous gérons les différents médias au jour le jour. Noémi gère la plupart des interactions sur les réseaux sociaux et fait une veille active mais je suis également très impliquée, en particulier sur Instagram.
- Instagram, Facebook, Twitter, YouTube, vous êtes présents partout. Comment définissez-vous le type de contenu à poster sur les différents réseaux ?
Noémi : chaque plateforme a une grammaire et une audience particulière. Chacune de nos plateformes a donc un ton, un rythme et un type de contenu particulier.
La plus grosse partie de notre public a commencé à nous suivre sur Facebook, dès 2014. C'est une plateforme très utile pour nous, notamment grâce à la possibilité d’organiser des événement, ce qui est forcément très utile pour... promouvoir des événements !
Avec l'attrait gigantesque du hashtag #foodporn sur Instagram, notre compte est de plus en plus suivi, et le hashtag #LausanneàTable de plus en plus utilisé par les commerces locaux et les gourmands qui testent des adresses.
Nous utilisons Twitter pour faire de la veille des acteurs locaux et à donner des informations pratiques précises. Quant à notre chaîne YouTube, nous ne l'avons pas véritablement investie de manière communautaire, elle nous sert surtout à compiler les vidéos qui concernent nos événements.
Nous faisons très attention à ne pas tomber dans le marketing pur. Notre but est évidemment de promouvoir nos événements et notre programme, mais nous travaillons également dur pour devenir un acteur local incontournable pour qui souhaite s'informer de gastronomie locale et d'actualité autour des thématiques liées à l'alimentation.
"Aujourd'hui, l'intérêt pour l'alimentation, la nourriture et les tendances alimentaires est énorme !"
- Comment vous expliquez-vous l'oversharing de photos de nourriture en ligne ?
Noémi : d'une part, la population occidentale est de plus en plus intéressée et concernée par ce qu'il y a dans son assiette mais ce n'est qu'une partie du phénomène. L'énorme succès des émissions de télé-réalité autour de la nourriture, qui a contribué à faire de certains chefs des stars planétaires, a très fortement accentué ce phénomène. Aujourd'hui, l'intérêt pour l'alimentation, la nourriture et les tendances alimentaires est énorme !
Le gigantesque essor d'Instagram depuis 2012 n'y est pas non plus étranger. En voulant poster régulièrement des images, les utilisateurs se tournent souvent vers leur quotidien, qu'ils magnifient et mettent en scène. Comme nous mangeons plusieurs fois par jour, c'est très naturellement que les utilisateurs ont commencé à photographier leur nourriture et ce phénomène de #foodporn est né.
Mais ce n'est pas nouveau ! Il ne faut pas oublier que l'alimentation a été une préoccupation de l'homme depuis toujours, combien y a-t-il de natures mortes de nourriture dans les musées ? La nourriture a toujours été un enjeu primordial pour l'humanité. La différence aujourd'hui c'est que l'on peut poser des statistiques sur ce dont les gens parlent... et ce qu'ils photographient.
"De ce côté-ci du Léman, la photo culinaire est plus calme."
- Selon vous, est-ce qu'Instagram - réseau social très axé sur le visuel - a influencé la façon dont nous mangeons et nous interagissons avec la nourriture ?
Noémi : une certaine partie des utilisateurs joue sur la frime d'être dans l'endroit où il faut être vu, avec le chef du moment ou devant l'ingrédient ou le plat phare. On l'a vu avec certaines tendances folles comme le fameux Cronut du pâtissier Dominique Ansel à New York.
De ce côté-ci du Léman, la photo culinaire est plus calme. Il y a ceux qui font des images très esthétiques de nourriture avec des dressages et des retouches carrément artistiques, et ceux qui mettent en avant la convivialité et les bonnes adresses ou qui sont fiers de partager leurs recettes. Nombreux sont donc ceux qui utilisent Instagram pour faire du micro-blogging avec des critiques et des conseils d'adresses. Ce que nous pratiquons aussi régulièrement sur notre compte Lausanne à Table où nous partageons non seulement l’actualité de l’association, mais aussi nos coups de coeurs gourmands lausannois.
Nous ne pensons pas qu'Instagram modifie fondamentalement les usages des gourmands, c'est toutefois un outil où ils peuvent se retrouver, échanger, se conseiller mutuellement. C'est plutôt dans les usages communautaires que les habitudes évoluent. Une étude française récente concluait qu'après avoir vu une image d'un établissement partagé par un ami, 66% des personnes ont envie d'aller dans l'établissement en question, ce chiffre décrit plus ces tendances communautaires de l'outil Instagram que des questions d'esthétiques pures.
L'autre évolution qui est en train d'arriver ici, avec un peu de retard sur les habitudes anglo-saxonnes, ce sont les établissements et autres acteurs du goût eux-mêmes qui commencent à diffuser leurs propres images, non seulement pour attirer les clients, mais aussi pour définir leur image et raconter leur quotidien. Ces prochains mois, nous prédisons la naissance de nombreux nouveaux comptes gourmands lausannois sur cette plateforme !
- Qu’est-ce qui passe en premier : prendre en photo de son plat avant même de l’avoir goûter ou le plaisir de manger ?
Elise : il y a bien sûr ceux qui veulent frimer avec la plus belle photo possible, mais nous croyons sincèrement que la plupart des utilisateurs qui usent et abusent des photos de nourriture sur Instagram sont également des foodies qui apprécient vraiment de manger et de découvrir de nouvelles adresses.
Noémi : l'esthétique du plat photographié compte beaucoup, et ce n'est pas si facile de faire une jolie image de nourriture, d'autant plus si on a déjà entamé son assiette. C'est pour ça que la plupart des Instagrameurs ou blogueurs gastronomiques photographient évidemment avant de manger. Ce qui ne les empêche pas d'apprécier le plat par la suite, après avoir posé leur téléphone...
- Les fails des photos de nourriture en ligne nous donneront raison : il n’est pas donné à tout le monde de faire des photos de qualité. Comment faire une photo qui fasse saliver ?
Noémi : tout dépend du sujet, est-ce une assiette ? Un produit ? Une vitrine ? Souvent, les images de nourriture sont assez plates, nous essayons toujours d'avoir une bonne lumière, un respect des couleurs originales, d'ajouter du volume, et si possible une ambiance. Notre conseil : prendre des photos régulièrement, tester plusieurs angles, prendre le temps de les recadrer et parfois retoucher un peu (ne pas abuser des filtres !). Il n'y a pas de meilleure manière de s'améliorer que de s'exercer ! Il nous arrive de manger un plat délicieux mais pas du tout photogénique, dans ces moments-là, il faut savoir renoncer plutôt que poster coûte que coûte.
Pour revenir aux fails, nous devons avouer que nous sommes friandes de comptes parodiques et humoristiques autour de la nourriture. Nous vous recommandons d'ailleurs les hiarants comptes "we want plates" et "taste of Streep" :-)
"Notre rôle est de montrer la richesse et la diversité de l'offre gastronomique de Lausanne et alentours !"
- Quels sont les retours (monétaires, followers, inscrits à l’association, etc.) des établissements dont vous faites la publicité gratuitement sur vos réseaux sociaux ?
Elise : Nous ne faisons pas de publicité en tant que telle. Nous nous positionnons comme un acteur local qui apprécie la bonne chère, les beaux produits et les artisans et artisanes talentueux. Nous parlons régulièrement de l'actualité de nos membres, mais nous fréquentons aussi de très nombreux établissements qui ne sont pas membres de notre association, ce qui ne nous empêche jamais de les mettre en valeur si nous avons apprécié notre visite. Notre seule règle : nous restons positives ! Ce n'est pas notre rôle de jouer les critiques. Notre rôle est de montrer la richesse et la diversité de l'offre gastronomique de Lausanne et alentours !
- Jusqu’à présent, quel est le réseau social qui vous a apporté le plus de visibilité ?
Noémi : Indéniablement Facebook, pour la simple raison des événements. Vu la diversité de notre programme, c'est le canal qui permet actuellement le mieux à ceux qui nous suivent de cibler leurs intérêts particuliers. Et sur certains événements de grandes ampleurs comme nos précédents Food Truck Festival de 2015 et 2016, et le Miam Festival en 2017, les events Facebook servent de caisse de résonance et augmentent fortement notre visibilité.
Mais notre compte Instagram, qui pourtant ne s'adresse vraiment qu'aux locaux, est en constante augmentation et nous sommes régulièrement surprises par son succès et son impact. Nous avons par exemple récemment observé un touriste, apparemment gourmand, qui a durant une semaine visité toutes les adresses que nous avions mises en lumière sur notre compte Instagram les semaines précédant son séjour. Ce qui nous fait très plaisir également, c'est le succès du hashtag #LausanneàTable que beaucoup de gourmands et d'acteurs du goût locaux utilisent maintenant pour mettre en avant ce qu'ils aiment dans la région, c'est un véritable plaisir à parcourir et cela nous donne l'impression que notre ambition d'animer la communauté locale de passionnés du goût est en passe de réussir :-)
- Instagram a lancé la fonction live récemment dans pour les stories vidéo, avez-vous prévu de l’utiliser ?
Noémi : Comme notre but est d'être accessible à tous, y compris aux moins connectés, nous restons toujours attentives à garder du contenu vivant et facile d'accès sur notre site, à continuer à faire un programme papier et une campagne d'affichage, et à continuer à utiliser nos plateformes de manière "conventionnelle"... ce qui ne nous empêchera pas d'expérimenter !
Nous aimons tester, donc oui, nous allons probablement utiliser cette fonction d'une manière ou d'une autre. Mais nous allons auparavant l'expérimenter avec nos comptes personnels pour en comprendre les défauts et les avantages, avant de décider de comment l'utiliser pour Lausanne à Table.
Au vu de nos programmes toujours plus touffus et diversifiés, nous nous réjouissons de ce genre d'outils, comme les stories d'Instagram, les lives, etc. qui nous permettront aussi de diversifier les modes de compte-rendu de nos événements.
- Merci ! Vous pouvez retrouver tout le programme de l'édition 2017 sur le site web lausanneatable.ch
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